PRIMAVERA

L'atelier d'art Primavera, lancé en 1912, est le fruit de l'heureuse collaboration entre Gustave Laguionie, directeur des grands magasins Printemps, son fils Pierre qui lui succèdera, et René Guilleré, avocat, collectionneur et fondateur de la Société des Artistes Décorateurs (SAD). Ces trois hommes souhaitent innover en commercialisant en petite série et à des prix abordables des objets d'art utilitaires, à la fois beaux et de qualité. Leur volonté commune et leur enthousisame se traduisent par l'ouverture d'un atelier de création original au sein même du Printemps, qu'ils baptisent Primavera en référence au nom du magasin. René Guilleré en prend la tête aux côtés de son épouse Charlotte Chauchet, elle-même peintre et décoratrice.

Le couple s'entoure de nombreux collaborateurs et recrute de jeunes artistes en vogue tels que Louis Sognot et Marcel Guillemard pour le département mobilier. La production, suspendue pendant la Première Guerre mondiale, est tout de suite importante et consacrée à tous les secteurs de la décoration intérieure : mobilier, luminaires, papiers peints, tapis, miroirs, verreries... La production de céramiques qui fera la popularité de Primavera et deviendra sa marque de fabrique. L'atelier confie et fait exécuter les modèles proposés par ses artistes à des ateliers artisanaux comme ceux de Paul Jacquet et Simonod en Savoie, ou des manufacture comme Longwy, Malicorne, Soufflenheim, Lunéville ou encore Quimper, que ces commandes contribuent à redynamiser. L'atelier rachète même certaines fabriques comme la faïencerie Sainte-Radegonde en Touraine et la manufacture de Céramique d'Art de Bordeaux.

D'importants moyens sont déployés par la direction pour promouvoir l'atelier d'art qui participe à tous les grands salons consacrés aux arts décoratifs. L'édification d'un pavillon dédié aux productions Primavera sur l'esplanade des Invalides lors de l'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925 marque l'apogée de son succès à la fois populaire, notamment auprès d'une clientèle modeste jusque là délaissée, et critique.

L'atelier perdure plus d'une trentaine d'années sous la direction de Colette Gueden. Sa production cesse en 1972 bien que la marque Primavera continue d'être utilisée jusqu'en 2007. Ces ateliers artisanaux lui ont sans conteste permis de s'affirmer comme un distributeur ancré dans la modernité. En étant le premier des grands magasins à proposer ce concept révolutionnaire, il ouvrit la voie à la création d'autres initiatives de ce genre comme celles de l'Atelier de la Maîtrise des Galeries Lafayettes sous la houlette de Maurice Dufrêne (1922), de l'atelier Pomone du Bon Marché dirigé par Paul Follot (1923) ou encore du Studium des Grands Magasins du Louvre tenu par le tamdem Martel-Kohlmann (1923).