Gilbert Poillerat, décorateur-ferronnier, est né à la limite de la Beauce et de la Sologne. Après l'école Boulle, d'où il sortit en 1921, et huit années passées chez Brandt tout jeune encore, le voici classé au premier rang des praticiens du fer. Pourtant, ce n'est qu'après s'être consacré à la ciselure et à la peinture qu'il se passionna pour cet art. Demandez-lui le style qu'il préfère dans l'ornement du fer, il vous répondra : "Le XVIIème siècle, car c'est l'époque qui animait les plus beaux ouvrages de ferronnerie. Un simple balcon, une rampe d'escalier portaient la marque de l'élégance et de l'esprit français".
Les arabesques de ses balustrades l'ont fait connaître au public. Ses hauts vantaux de bronze, décorés de motifs robustes et gracieux, tournent sans secousse. On passe des heures à regarder ses dessins précis, ses recherches de chaque jour. L'escalier, la porte, le lampadaire, la table, Gilbert Poillerat les éclaire en décidant de leurs formes et de leurs volumes, car il ajoute à son art de décorateur les connaissances techniques de la forge. Il est en effet essentiel que les plans soient cotés au millimètre, donnant tous les détails de construction de chaque ouvrage. La perspective et l'épaisseur sont indiqués par des chiffres auxquels doivent se conformer les ouvriers ferronniers.
Les barres, les profilés arrivent des laminoirs à l'usine, cette cité vibrante de martelage où les hommes, méthodiquement, rabattent, cintrent, percent, tournent, soudent à l'aide de puissantes machines actionnées par l'électricité. Là, les scieuses tranchent d'énormes barres de fer avec la même facilité que s'il s'agissait d'un vulgaire madrier. C'est dans ce domaine que, depuis 1918, explique Gilbert Poillerat, l'outillage des industries mécaniques a permis des réalisations audacieuses, surtout dans la ferronnerie de bâtiment, car un édifice construit avec des moyens perfectionnés monte en quelques mois et doit suivre la cadence accélérée du chantier.
Il semble que ces ornements restent l'apanage d'hôtels particuliers, de studios d'artistes, de maisons de campagne qui cherchent dans le raffinement une parure, un style. Cela revient à dire que bien souvent l'artiste est tributaire de l'architecte qui ordonne la décoration de l'édifice qu'il construit. Suivons seulement aujourd'hui le Maître ferronnier. Ses dessins nous prouvent jusqu'où peut aller sa conception toujours en éveil. Les médailles, dans lesquelles Gilbert Poillerat excelle, avec tout l'art délicat de la ciselure montrent une autre partie de la diversité de son talent, sans oublier la peinture et les dessins de paysages de Touraine qui, dans la précision du détail, du trait, nous font refermer le cycle à son point culminant : la Ferronnerie.